Et si cette crise sanitaire permettait de rêver un peu ? Pour les cadres territoriaux, qu'est ce qui est positif dans cette période ? Dans le fonctionnement de la collectivité, dans les manières dont on travaille ou dont on regarde le territoire, si tout était possible, qu'est-ce qu'ils souhaiteraient voir rester après la crise ?
Nous avons demandé à Jean-Michel Pignol, DGS de Saint-Laurent-du-Var (Alpes-Maritimes, 28 453 habitants). Pour lui, les relations entre agents, entre élus et administration, entre habitants et territoire sont largement chamboulées... Et il le voit plutôt d'un bon œil !
Plus d'autonomie dans les services
En interne, le confinement et le télétravail ont fait naitre de nouveaux canaux de communication entre agents. Sur la messagerie Whatsapp notamment, les groupes de travail ont fleuri, pour échanger sur les missions, le service, ou tout simplement pour garder un lien. Ce genre de fonctionnement en communauté, pour lui, facilite la prise d'initiatives : il cite par exemple la création de groupes d'agents volontaires pour distribuer de l'aide alimentaire ou veiller sur les plus fragiles.
Chaque unité de travail a créé ces petites communautés pour être en lien... C'est intéressant, ce sont nos agents et qui y relaient l'information, ça multiplie les moyens de communication interne. Et surtout, pour nous, c'est un encouragement à la déconcentration d'un certain nombre de fonctions, à l'autonomisation des unités de travail. C'est d'ailleurs le sens de la démarche managériale qu'on essaie de conduire depuis quelques années...
Bien sûr, il y a toujours cette prégnance du pouvoir des élus qui vient régulièrement percuter l'autonomie des unités de travail. On y est confrontés au quotidien, mais là, on sent qu'il y a des capacités d'organisation au sein des équipes qui se sont libérées. Demain, il faudra arriver à les pérenniser, en leur donnant plus de latitude, y compris sur la gestion RH. Pour ça, on réfléchit déjà à des tutoriels, des FAQ...
Une gouvernance plus sereine
A Saint-Laurent-du-Var, le Maire Joseph Segura a été réélu au premier tour. Soit, pour Jean-Michel Pignol, une occasion inespérée de prendre le temps d'installer une charte de gouvernance et de bonnes pratiques de la relation entre pouvoir légitime et administration...
La crise [et le report de la prise de fonction du Maire fraichement élu à une date ultérieure] laisse du temps pour peaufiner ces outils de gouvernance. On a là une opportunité inespérée de réfléchir et de faire plus de pédagogie sur le rôle et la place de chacun !
Le retour du local
Enfin, il pointe le retour en force de l'échelon local dans cette crise.
L'encouragement à la production agricole, l'approvisionnement local de nos cantines... Ce sont des projets qu'on avait dans l'air depuis un moment, qui existaient dans le projet municipal, mais sur lesquels ont avait du mal à se poser. Là, je pense qu'on a une opportunité à saisir pour faire fructifier ce besoin de local, qui ressort de manière évidente dans cette crise.
Il y a peut-être une bascule du logiciel politique. On commence à se dire qu'au-delà des infrastructures, il faut aussi travailler le lien entre les habitants et leur territoire. Car nous avons beaucoup de belles initiatives locales, y compris parmi nos entreprises : fabrication de masques, de gel hydro-alcoolique, mais aussi par exemple création d'un groupe Whatsapp « Covid-19 » avec les commerçants et leurs associations...
C'est un changement. Jusque là, on était plutôt partis sur l'idée qu'il fallait se désinvestir de l'économie locale, dans la mesure où c'est plutôt une compétence métropolitaine. Mais avec la crise, on se rend compte que le lien privilégié avec le territoire et les entreprises passe avant tout par la commune.